dimanche 31 janvier 2010

Les premiers résultats des enquêtes nationales sur les risques psychosociaux au travail

Santé au travail
La souffrance psychique en forte augmentation
Selon les résultats d'enquêtes de terrain menées par l'INVS et le ministère du Travail, la souffrance psychique se hisse au deuxième rang des maladies professionnelles derrière les TMS.

Alarmant : non seulement la souffrance psychique s’incruste à la deuxième place des maladies professionnelles, juste derrière les troubles musculo-squelettiques, et bien avant les problèmes auditifs et les troubles de la vue, mais elle s’agrave. C’est le navrant constat que font conjointement l’Institut de veille sanitaire (INVS) et le ministère du Travail, à l’issue d’une vague de trois enquêtes de terrain menées en 2006 et 2007, fondées non sur des questionnaires, mais sur plus de 33 500 consultations (obligatoires pour la très grande majorité), auprès de 283 médecins du travail de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Prévalence des troubles psychosociaux
Même si l’étude reste circonscrite à un territoire, elle donne la mesure du fléau. La prévalence des maladies psychosociales est passée de 1,2 % à 1,4 %. Et les manifestations en sont de plus en plus variées : « dépression », « troubles du sommeil », « souffrance due au harcèlement moral », « syndrome anxio-dépressif », etc. Au total, 469 pathologies ont été dûment répertoriées par les praticiens. Les sources de ces maux ?

Les femmes souffrent plus
L’organisation du temps de travail, les dysfonctionnements managériaux ou les problèmes de collectif de travail. Le salarié qui souffre au travail est plus souvent cadre ou ouvrier, les employés étant relativement épargnés. Les femmes sont plus nombreuses parmi les victimes, et les secteurs les plus exposés sont, selon cette enquête, les activités financières et l’industrie. Mais l’administration et l’action sociale au sens large ne sont pas pour autant épargnées. Les épidémiologistes notent que le risque augmente avec l’âge, ce qui n’est pas de bonne augure, compte tenu du vieillissement général de la population.
Santé au travail
Les premiers indicateurs des risques psychosociaux au travail sont dévoilés
Mis en place à la demande du ministère du Travail, le collège d’expertise sur le suivi statistique des risques psychosociaux vient de présenter ses premiers indicateurs. La liste définitive sera connue mi-2011.

Le collège d’expertise sur le suivi statistique des risques psychosociaux au travail a présenté ses indicateurs provisoires aux partenaires sociaux, le 9 octobre, lors de la réunion du Conseil d’orientation sur les conditions de travail.Ce collège a été constitué fin 2008, à la demande de Xavier Bertrand, alors ministre du Travail, suite au rapport Nasse et Légeron sur les risques psychosociaux au travail (v. Bref social n° 15077 du 13 mars 2008). Sa mission est de préciser ce qui doit être mesuré pour apprécier le niveau de ces risques. Le collège a retenu, à titre provisoire, six dimensions de risques à caractère psychosocial : les exigences du travail, la charge émotionnelle, l’autonomie et les marges de manœuvre, les rapports sociaux et les relations du travail, les conflits de valeur et l’insécurité socio-économique.Il doit poursuivre ses travaux et proposer une liste définitive d’indicateurs à la mi-2011.
Exigences au travail et charge émotionnelle
Le collège d’expertise retient plusieurs indicateurs pour décrire les exigences au travail : la quantité de travail, la pression temporelle, la complexité du travail et les difficultés de conciliation entre les vies professionnelle et personnelle.
S’agissant des exigences émotionnelles, le collège identifie les indicateurs suivants :
– l’épuisement émotionnel (burn out) et la difficulté à être disponible émotionnellement pour ses proches, après le travail ;
– la facticité des émotions, avec le sentiment pénible de continuer, après le travail, à « mimer » mécaniquement des émotions que l’on ne ressent pas. Ceci correspond plutôt aux métiers du tourisme et du commerce, où il faut sans cesse avoir l’air enjoué. Certaines recherches ont mis en évidence une corrélation possible entre la répression des émotions au travail (celle de la colère par exemple) et l’augmentation des troubles musculosquelettiques et de l’hypertension artérielle ;
– le contact direct et les tensions avec le public ;
– l’empathie et le contact avec la souffrance ;
– la peur au travail.

Autonomie et rapports sociaux
Le collège a également défini des indicateurs concernant l’autonomie et les marges de manœuvre au travail. Il s’agit de : l’autonomie procédurale, c’est-à-dire la liberté de décider comment faire son travail et de pouvoir l’interrompre momentanément quand on le souhaite ; la prévisibilité du travail ; l’utilisation et le développement des compétences (avoir l’occasion d’apprendre des choses nouvelles) ; la participation et la représentation, soit le sentiment d’être consulté lors de la mise en place de changements organisationnels ou technologiques.
Concernant les rapports sociaux et les relations de travail, quatre indicateurs sont proposés :
– le soutien social au travail (nombre de contacts et qualité du soutien procuré sur différents plans) ;
la violence au travail. Cette dernière, et en particulier la violence psychologique, constitue un des facteurs de risques majeurs de troubles dépressifs et une des premières causes externes de suicide. Elle peut être caractérisée comme une situation dans laquelle un individu subit de la part d’une ou plusieurs personnes de l’entourage professionnel (collègues, hiérarchie) des comportements hostiles de façon prolongée, cherchant à le blesser, l’isoler ou l’exclure ;
– la reconnaissance des efforts consentis pour effectuer un travail de qualité et les récompenses qui en découlent en termes de déroulement de carrière, de rémunération, de sécurité de l’emploi et d’estime de la part de la hiérarchie et des collègues. Il s’agit également du sentiment que son travail est « utile aux autres » ;
– le leadership, c’est-à-dire la clarté de ce que l’on a à faire dans son travail.

Conflits de valeurs et insécurité de l’emploi
Des indicateurs visent également les conflits de valeur. Il s’agit de « l’obligation de travailler d’une façon qui heurte sa conscience professionnelle ». Cette contrainte a un effet sur la santé mentale. Les personnes concernées peuvent adopter différentes stratégies défensives, telle que l’hyperactivité. Peuvent être utilisés comme indicateurs le sentiment de faire dans son travail des choses que l’on désapprouve (vente abusive, réaliser des licenciements, etc.), et estimer ne pas avoir les moyens de faire un travail de qualité.
Enfin, l’insécurité de l’emploi, définie comme « l’impuissance ressentie à préserver la continuité souhaitée dans une situation de menace sur l’emploi », se manifeste notamment par le sentiment de « devoir changer de qualification ou de métier dans les années à venir », et de « ne pas se sentir capable de faire le même travail qu’actuellement jusqu’à 60 ans ».

- Consulter le document "Indicateurs provisoires de facteurs de risques psychosociaux au travail"

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